Le gouvernement chinois s’est réjoui de voir que les autorités américaines avaient placé le Mouvement islamique du Turkestan oriental sur une liste de groupes terroristes. Les Etats-Unis soulignent que cette décision ne doit pas être interprétée comme une approbation de la politique suivie par la Chine au Xinjiang.
L’activisme de groupes séparatistes au Xinjiang (appelé “Turkestan oriental” par ses partisans) préoccupe depuis des années les autorités chinoises. Le contexte de la “guerre contre le terrorisme” leur offre une occasion de tenter de justifier leur politique dans la région, où se sont effectivement produits plusieurs attentats à partir des années 1990 (attentats à la bombe, mais aussi assassinats ciblés de figures religieuses musulmanes liées au régime chinois). L’immigration massive en provenance d’autres régions de la Chine a contribué à développer des sentiments d’insatisfaction dans la population indigène et à entretenir la nostalgie de tentatives indépendantistes.
Au mois de janvier 2002, un rapport chinois avait tout particulièrement mis en cause le Mouvement islamique du Turkestan oriental, qui serait dirigé par Hasan Mahsum. Les autorités chinoises l’accusaient d’être lié à Oussama ben Laden et soutenu par celui-ci.
Arrêté au Pakistan, Ismail Kadir – qui serait le numéro trois du Mouvement islamique du Turkestan oriental – avait été extradé vers la Chine en mars 2002. Le gouvernement chinois affirmait qu’un millier d’Ouïgours avaient été entraînés en Afghanistan. Les autorités chinoises souhaitent obtenir l’extradition de tous les combattants ouïgours qui y ont été arrêtés.
Cela ferait maintenant plusieurs jours, a-t-on appris le 26 août 2002, que le Département d’Etat américain aurait placé le Mouvement islamique du Turkestan oriental non pas sur la liste (plus courte) des organisations terroristes étrangères, mais sur celle de plusieurs centaines d’entités considérées comme liées au terrorisme et faisant donc l’objet de sanctions financières (gel de leurs avoirs éventuels aux Etats-Unis, etc.).
L’impact de la mesure paraît pour l’instant plutôt symbolique, mais donne une satisfaction morale au gouvernement chinois et l’aidera à justifier la politique suivie au Xinjiang. Les responsables américains disent être parvenus à la décision de placer le mouvement sur une liste noire en raison des actes de violence indiscriminés frappant des civils non armés qu’aurait commis le groupe. Il ne semble pas, en revanche, qu’aient été fournies du côté américain une appréciation ou des précisions sur les liens supposés avec Al Qaïda.
Rapport chinois du mois de janvier 2002 accusant le Mouvement islamique du Turkestan oriental d’être lié aux réseaux d’Ousama ben Laden et impliqué dans des activités terroristes:
http://www.china.org.cn/english/2002/Jan/25582.htm
Pour en savoir plus sur les Ouïgours: le N° 25 (janvier-juin 1998) des Cahiers d’études sur la Méditerranée orientale et le monde turco-iranien (CEMOTI) leur avait été consacré. Il contient notamment un article d’Artoush Kumul sur “Le ‘séparatisme’ ouïgour au XXe siècle” (pp. 83-91) [l’auteur place entre guillemets le mot de “séparatisme”, car il lui semble plus approprié de parler de “mouvement national de libération”].